1837
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Le Vieux Chêne

1837


Naguère, sur les bords de l'onde murmurante,
Un vieux chêne élevait sa tête dans les cieux ;
Et de ses rameaux verts l'ombre rafraîchissante
Protégeait l'humble fleur qui naissait en ces lieux.
Les zéphirs soupiraient, le soir, dans son feuillage
Argenté par la lune, et dont plus loin l'image
Ondoyait sur les flots roulant avec lenteur ;
Les oiseaux y dormaient la tête sous leur aile,
Comme, la nuit, sur l'eau repose la nacelle
Immobile du pêcheur.

Des siècles à ses pieds reposait la poussière.
Que d'orages affreux passèrent sur son front
Dans le cours varié de sa longue carrière !
Que de peuples tombés sans laisser même un nom !
Impassible témoin de leur vaste naufrage,
Que j'aimais à prêter l'oreille à ton langage
Si plein de souvenirs des âges révolus !
Lui seul pouvait encore évoquer sous son ombre
L'image du passé, les fantômes sans nombre
Des peuples qui n'étaient plus.

O chêne, que ton nom résonne sur ma lyre,
Toi dont l'ombre autrefois rafraîchit mes aïeux.
J'ai souvent entendu le souffle de zéphire
Soupirer tendrement dans tes rameaux noueux.
Alors l'oiseau du ciel dans sa course sublime
Montait, redescendait, et caché dans ta cime,
Il enivrait les airs de chants mélodieux,
Et dans un coin obscur de ton épais feuillage
Il déposait son nid à l'abri de l'orage,
Entre la terre et les cieux.

Mais depuis a passé le vent de la tempête ;
La foudre a dispersé tes débris glorieux.
Le hameau cherche en vain ta vénérable tête
Se dessinant au loin sur la voûte des cieux :
[Il n'aperçoit plus rien dedans l'espace vide.
Au jour de ta colère, une flamme rapide
Du vieux roi des forêts avait tout effacé.
Hélas! il avait vu naître et mourir nos pères,
Et l'ombre qui tombait de ses bras séculaires,
C'était l'ombre du passé.

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